Comment j’ai réveillé des spectateurs endormis

Sur les saisons 2019/2020 et 2021/2022, la vente de billets était au plus bas : moins de 10 000 tickets vendus soit un effondrement des ventes d’environ 85% par rapport à la saison 2017/2018. Notre public ne s’était donc pas décidé à revenir en salle, malgré la fin de la crise sanitaire, et cela risquait de durer, puisque les équipes au contact du public nous faisaient remonter des changements d’habitude marqués. Nous avons alors sondé, via un questionnaire en ligne, celles et ceux qui n’avaient pas renouvelé leur abonnement ou dont nous n’avions plus de nouvelles depuis le COVID. Sans surprise, nous avons constaté qu’ils privilégiaient des soirées entre amis ou en famille et des offres de divertissement à domicile, Netflix, par exemple. Il est apparu également une tendance à réserver les sorties culturelles de plus en plus à la dernière minute.

Pour réagir à cette situation catastrophique, nous avons décidé de réactiver les fiches de nos spectateur·ices « endormi·es », c’est-à-dire, celles et ceux qui n'avaient pas assisté à nos événements depuis au moins trois ans. Puis, nous leur avons adressés une campagne email afin de prendre de leurs nouvelles et leur rappeler la singularité de nos propositions culturelles. Les retours ont été très encourageants. Une grande majorité des personnes contactées a été touchée par notre message et a exprimé son envie de revenir dans nos salles. 

La fréquentation du théâtre est repartie à la hausse, mais nous sommes encore très loin des chiffres pré-COVID (- 45% environ). Nous devons donc continuer à encourager et provoquer la venue de notre public, d’autant que nous souffrons également d’un problème d’accessibilité depuis deux ans en raison des travaux du tram qui décourage beaucoup d’habitant·es de la région de Liège et les détourne vers le centre culturel de Huy, entre autres.

Cette baisse drastique et durable de la fréquentation du théâtre nous a finalement conduit à mettre en place de nouvelles routines de ciblage et à investir dans un outil plus performant que les tableaux croisés dynamiques d’Excel que nous utilisions avant. Depuis septembre 2024, nous avons, en effet, opté pour Delight Data, une solution numérique française qui se connecte à notre billetterie Utick et nous permet de facilement segmenter notre base de contacts. En outre, Delight dresse un portrait bien plus précis de notre public, tout en nous assurant de son consentement : localisation, âge, habitudes et temporalités d’achat, panier moyen, etc.

Aujourd’hui, lorsque j’identifie un défaut de remplissage sur un spectacle — ce fut le cas par exemple pour Blooming, une proposition de danse de Marco Martins — je sélectionne via Delight le public habituel de la danse qui n’a pas encore réservé ce spectacle et je leur adresse un code promo. Dans le cas de Blooming, ce ciblage a généré 47 commandes, soit 82 billets supplémentaires. Ainsi, je constate que ce pilotage par les données, associé à notre compréhension et notre connaissance du public et des spectacles, a un impact réel et immédiat. Cependant, il ne s’agit pas de s’arrêter au public existant, il est essentiel pour nous d’aller chercher en permanence de nouveaux publics et nous avons dans l’équipe une personne qui travaille spécifiquement sur ce sujet.