3.03. "Ne pas réveiller les morts" ou utiliser avec soin sa base de contacts

Ou comment “ne pas réveiller les morts”... en utilisant précautionneusement sa base de contacts. Dans cette fiche, on découvre pourquoi l’accumulation sans fin de contacts dans vos bases n’est pas une bonne chose pour votre stratégie marketing (et pour votre image non plus).

Toute personne ayant déjà eu à communiquer le sait : il est très tentant de vouloir s’adresser à l’entièreté de sa base contact. De la même manière, il est aussi compréhensible de chercher à engranger le maximum de contacts en pensant, dans une logique arithmétique compréhensible mais non vérifiée, obtenir un meilleur engagement en s’adressant à plus de personnes. Ces deux logiques sont aussi infondées qu’inopérantes, et peuvent même s’avérer contre-productives pour votre stratégie marketing. On fait le point sur ces deux réflexes à déconstruire, sur le cadre légal qui s’applique et sur les bonnes pratiques de gestion de données qu’il détermine.

S’adresser à tout le monde revient souvent à ne s’adresser à personne 

Un message trop général perd en impact et peut se perdre dans la masse de personnes moyennement concernées par le message transmis, voire pas concernés du tout. Prenons l’exemple d’une personne qui fréquenterait un lieu culturel pour y voir uniquement du théâtre de répertoire, dont les habitudes de réservation sont celles d’un acheteur « dernière minute » et à qui l’on enverrait un message concernant l’ouverture de la saison jeune public : il y a fort à parier que le message n’aura aucun intérêt pour cette cible. À l’inverse, il est probable que la cible concernée par ce message avait besoin d’informations spécifiques, d’une tonalité d’adresse, ou d’un cadre visuel adapté pour être impactée. Cette même communication, en ne s’adressant pas spécifiquement aux profils présentant un historique de réservation jeune public, ne remplit pas les critères permettant d’en assurer l’impact.

C’est la démonstration qu’en essayant de plaire à tous, on finit par ne plaire à personne de manière significative.

Ce type de comportement d’envoi peut s’avérer nocif pour la stratégie marketing au-delà de l’envoi lui-même : en effet, si ce type de communication inopportune est répété, elle sera "vécue" comme indésirable et peut susciter chez la personne qui soit un signalement en message indésirable. Or ces signalements sont répertoriés par votre service d’envoi d’emails, et jouent sur la délivrabilité de vos messages futurs. Toute opération future de communication serait entachée, de fait, des conséquences des précédentes. C’est aussi un argument précieux à retenir pour faire face aux demandes pressantes de communications non anticipées (voir fiche « Comment dire non à une énième demande d'emailing ou publication sur les réseaux sociaux ? (et obtenir gain de cause) »)

Les envois massifs et non rationalisés d’emails font aussi un usage irréfléchi des ressources financières et humaines du lieu, pourtant précieuses et disponibles en quantité limitée. En effet, l’envoi d’emails est un service coûteux, sur lequel les économies d’échelle ou la compression des coûts est restreinte. C’est pourquoi, dans la réalité très contrainte des équipements culturels, il est nécessaire de penser soigneusement ses envois de mails pour en garantir l’efficacité, et le coût proportionné. En outre, les équipes en charge de la stratégie s’évaluent, et sont évaluées sur l’impact de leurs actions de communication. Dépenser inutilement leur budget limité sur de mauvaises cibles en détériorant du même coût les résultats de leurs actions représente une sorte de double peine.

Une "petite" base utilisée correctement et réactive vaut tous les fichiers clients du monde 

En définitive, comment assurer la santé de sa base contact, l’utiliser efficacement et dans le respect de la loi ?

Tout d’abord en basant les actions de communication sur un ciblage soigneux, ou encore sur la segmentation de vos publics [Lien vers fiche 25 « Définir des audiences pour adapter son adresse »]. Une telle approche de votre communication permet d’envoyer un message plus engageant à une quantité de personnes certes plus réduite, mais bien plus encline à transformer votre contenu en acte de réservation. Cela présente également la vertu d’éviter de sursolliciter vos cibles qui peuvent se fatiguer devant la recrudescence de communications sans valeur ajoutée pour elles, et à terme se désengager. En matière d’envoi d’emails, rien ne sert de courir : il vaut mieux envoyer votre emailing à 50% de votre base et obtenir un taux d'ouverture à 70% que de l'envoyer à 100% avec un taux d'ouverture à 35%. Cela améliorera d’autant plus votre délivrabilité dans les obscurs calculs de votre outil d’envoi d’emails.

Par ailleurs, il est important d’ancrer vos pratiques d’envoi dans le cadre légal strictement défini par le règlement général sur la protection des données [lien vers fiche 9 règlementation applicable aux données]. S’agissant de l’envoi d’email, ce cadre stipule précisément les conditions dans lesquelles vous pouvez adresser vos communications à une personne, et la plus importante d’entre elles tient au recueil de son consentement explicite à être démarchée par email, qui prend la forme d’un « opt-in » dans le langage informatique. Ce consentement explicite est classiquement recueilli à l’occasion d’une transaction de réservation sur la billetterie de l’équipement, de la création d’un compte client ou encore d’une inscription volontaire à la newsletter de l’établissement. On précise immédiatement que le motif d’intérêt légitime n'est pas mobilisable pour prospecter commercialement sans ce recueil de consentement préalable (pour la France, c’est l’article L 34-5 du CPCE (lien externe) qui le stipule).

Enfin, il s’agit de nettoyer régulièrement votre base, et là encore le RGPD a déterminé la règle à suivre : il vous faut supprimer les coordonnées des contacts inactifs depuis 36 mois. Cette inactivité se juge par l’absence d’ouverture de vos communications et bien-sûr par l’absence de réservations à vos spectacles. Pour le cas où vous souhaiteriez conserver les données des personnes, à des fins d’analyse comportementale ou de suivi d’historique de réservation, il faudra les anonymiser, et pour cela suivre un processus complexe que seuls l’éditeur de votre logiciel contenant la base de données sera en mesure de réaliser. Pour le cas où vous travaillez sur un tableur interne, comme cela est également possible [lien vers fiche 14 quelle place pour les tableurs], il est recommandé de suivre la documentation établie par votre organisme national de suivi et d’application du RGPD (en France, il s’agit de la CNIL. Les structures nationales sont référencées pour tous les pays européens dans la fiche dédiée aux règlementations applicables aux données. Enfin, il s’agit également de nettoyer toutes les adresses email invalides de vos bases, et de vos fichiers d’envoi.

Pour aller plus loin

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