En l'an 2000, un quart des informations consignées dans le monde existait au format numérique. En seulement 13 ans, ce taux est passé à 98%. Les espaces numériques, encore tout à fait facultatifs au début du siècle, ont pris une place centrale dans les activités humaines, y compris culturelles.
Dans ce monde numérique, les espaces socionumériques (les réseaux sociaux) représentent un phénomène en soi, avec un taux de pénétration de 80,3 % de la population française avec 52,60 millions d’utilisateurs actifs en janvier 2022 contre 58,4% au niveau mondial (We Are Social, Hootsuite, 2022). Dans ce contexte, un véritable processus de "mise en données" du monde (ou "Datafication"1) est à l’œuvre, et dont les implications sont encore insoupçonnées : "numériser non plus des documents, mais tous les aspects de la vie."
"Data brokers, les courtiers de nos données (lien externe)", l'épisode du 7 juillet 2018 de l'émission de France Inter "Tout est numérique", présente l’ampleur du commerce réalisé autour de ces données semées à chaque instant de notre activité numérique, notamment par les Data Brokers. Ces courtiers en données sont spécialisés dans la collecte, l’achat et la vente de données sur des personnes ou des organisations. Ces données englobent une large variété d’informations, allant des données démographiques aux comportements de consommation, en passant par les habitudes de navigation sur Internet, les informations financières et les historiques d’achats. Les data brokers obtiennent ces informations à partir de sources publiques, telles que les registres gouvernementaux, les listes électorales et les informations disponibles sur les réseaux sociaux mais aussi des données commerciales recueillies via des transactions, des programmes de fidélité ou des enquêtes de satisfaction. De plus, ils collectent des données numériques par le biais de cookies, d’applications mobiles, de sites web et de plateformes de médias sociaux. Cette "mise en données" massive porte en elle une véritable idéologie, à en croire Jeff Brookes, éditorialiste du New York Times : l’idée que “tout ce qui est mesurable devrait l’être” et que la donnée pourrait nous aider à faire des choses aussi remarquables que de "prédire le futur".